Nul ne peut remettre en cause le rôle important des organes de gestion électorale dans la réforme de la loi électorale. En effet, ceux-ci regorgent d'une expertise irréfutable et d'une expérience pratique en matière électorale ainsi que d'un réseau élargi de partenaires qui sont dotés de compétences requises dans le domaine de l'examen des processus juridiques. C'est dans cette optique que Elections Cameroon, l'organe en charge des élections au Cameroun, se range du côté de ceux qui demandent une réforme du code électoral.
Erik Essousse (DG d'ELECAM) a adressé une correspondance le 19 février 2021 donnant 8 jours à ses démembrements pour collecter les propositions d'amendement de la loi portant code électoral. Une demande de plusieurs acteurs de la scène politique qui exigent une réforme de tout le processus électoral.
La réforme du code électoral va de pair avec l’évolution socio-politique et démocratique d'un pays. Ceci dans la mesure où l'échec d'une élection a toujours eu des conséquences dramatiques sur la stabilité politique, la santé économique et la sécurité des citoyens d'un pays. Les cas sont d'ailleurs légion à ce sujet: le Kenya en 2007 et 2013, le Zimbabwe en 2008, la côte d'ivoire en 2010 et 2020, la RDC en 2011 et 2018, les seychelles en 2011, le Ghana en 2012, le mali en 2013, la guinée Bissau en 2014, et la Mauritanie en 2014, le Togo en 2019, la guinée conakry en 2020 et la liste est loin d'être exhaustive.
Autant d'exemples qui justifient la pertinence de la réforme du code électoral et la nécessité pour les organes en charge des élections d'activer le processus dans l'urgence. Ces organes peuvent souvent faire recours soit à des partenaires nationaux et internationaux comme ce fut le cas du Malawi en 2014, soit à l'organe judiciaire comme ce fut le cas de la commission électorale indépendante du Nigeria en 2002-2003 qui avait engagé une procédure judiciaire devant le tribunal à l'encontre de la loi électorale de 2002 dans le but de juger la constitutionnalité de certaines nouvelles dispositions relatives à leur autorité à déterminer la date et l'ordre des élections. Ce fut également le cas de l'Afrique du Sud en 2014 avant la tenue des élections où deux (02) affaires judiciaires devant la cour constitutionnelle ont fourni une toile de fond à des modifications du cadre juridique régissant les élections.
Ainsi donc sur la base des rapports post-électoraux, ELECAM a su recenser les succès et les échecs, identifier les lacunes et les chevauchements ainsi que les nouveaux défis du point de vue juridique.
Toutefois, l’impartialité, l'inclusivité, la transparence, l'intégrité et la régularité d'une élection sont tributaires d'un ensemble de paramètres qui dépassent largement le seul cadre de la reforme du code électoral.
En effet, celles-ci impliquent également divers aspects de la vie politique tels que le taux de participation aux processus électoraux, le niveau de l'engagement social et de l'action militante, l’efficacité des différentes méthodes de participation publique, la compétence civique, le niveau d'éthique social des citoyens. À ceci il faut ajouter le comportement des leaders politiques et surtout des médias. Car lorsqu'on scrute et analyse par l'exemple politique, l’on note le clignotement incessant et persistant d'un immense signal d'alarme qui indique un niveau inquiétant de désintérêt d'un nombre considérable des citoyens. Certes, nul ne peut nier que lors du scrutin d'octobre 2018 nous avons eu des moments forts, empreints d'une grande charge émotive ou symbolique, ponctués d'indignation, de colère, de ras-bol provoquant un fort désir de changement où à l'inverse , une forte résistance qui s'est exprimée par des mobilisations et un militantisme temporaire et effervescent.
Que dire de la culture de vautour de certains médias. Si les manquements éthiques des membres de la classe politique portent lourdement à conséquence sur la participation citoyenne, il en est aussi de même en ce qui concerne les dérapages déontologiques des membres du pouvoir médiatique. Il ne fait plus aucun doute que la déformation des faits, les raccourcis simplistes et sensationnalistes d’un trop grand nombre de journalistes et de commentateurs autant que les interprétations souvent sarcastiques ou tendancieuses et même parfois outrancières sinon carrément vulgaires contribuent largement à alimenter le cynisme ambiant face à la politique et à ses acteurs, tout en nourrissant la nouvelle culture de la politique spectacle et de l’information spectacle.
Les obstacles relevés plus haut sont solidement ancrés dans nos sociétés mais ils ne sont pas immuables. Ils cesseront d’imposer leurs effets pernicieux quand une masse critique de citoyens éveillés et désireux de participer à la vie politique et citoyenne se constituera. À ce propos, on peut affirmer que les changements souhaités, autant que souhaitables, seront facilités quand émergeront et entreront en scène de véritables leaders animés d’une nouvelle éthique fondée sur une conscience de l’importance d’agir, de penser et de ressentir différemment en regard de la vie politique. À coup sûr, au delà de la reforme du code electoral, ce sont les mentalités qui doivent être changées.